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L'accouchement
30/01/2015 18:22Quand j'étais petite, ma Montana Mum me racontait souvent l'histoire de ma naissance. Et comme souvent, chaque fois que je lui demandais si cela faisait mal et à quoi cela pouvait bien ressembler comme douleur, Montana Mum me répondait "Oui ça fait mal. Mais tu sais, il y a un proverbe qui dit Mal d'enfant, mal joli ; sitôt fini on l'oublie. Et ce proverbe est vrai."
Alors à toi lectrice, qui n'a jamais connu l'accouchement, je vais t'expliquer.
L'accouchement, pour y venir, il y a trois possibilités et deux façons de le vivre dans l'histoire : celle de toi, future maman et de lui, futur papa.
Comme tu le sais, soit tu perds les eaux et crois-moi, t'as l'impression que ton gamin fait un Ice Bucket Challenge entre tes cuisses -mais sans glace parce que t'es pas dernière génération et que ton gosse de toutes façons, il est trop petit pour avoir un minibar dans sa chambre/piscine chauffée- Conclusion, quand ça arrive, tu n'attends pas, tu fonces direct à l'hosto parce que les contractions vont commencer et que plus tu vas attendre, plus tu as de risques de ne plus être capable de mettre un pied devant l'autre tellement les contractions vont être de plus en plus... -j'ai vraiment fait un arrêt dans mon écriture pour chercher le mot adéquat- déchirantes mais qu'en plus de ça, ton bébé risque des petites infections sympas. Donc pas de chichis, tu attrapes Monsieur et vous filez.
Soit, tu ne perds pas les eaux et tu ressens des contractions. Alors, non, évites toi les fausses alertes avec le branle-bas de combat. Attends. Repose cette valise tout de suite, j'ai dit. Les vraies contractions, celles qui t'annoncent que c'est le début de la fin de ton calvaire de cachalot boursouflé des doigts de pieds, elles t'arrachent des coupures dans tes phrases et crois-moi, tu ne souriras pas en disant à ton homme "Mâmouuuur, je crois qu'il faut y'alleeeeer". Non, non. Tu lui diras plus "Rhaaaaa... J'ai maaaaal !" Ce à quoi il te demandera si tu as verrifié sur ta petite application prévue à cet effet si elles sont bien régulières et de moins de sept minutes. (Eh oui, l'homme n'avait pas l'air de t'écouter quand tu lui brandissait, vaillante, ton téléphone avec ton application avec toutes les explications nécessaires sur le déroulement de la procédure 23-78K2 bis pour un départ en bonne et dùe forme à la maternité. Sauf qu'en fait, l'homme entend. Il a rangé ça dans un coin de sa tête, est infoutu de te le ressortir tant que la situation n'est pas enclenchée, mais lorsque le moment est arrivé, il te ressort à la lettre tout ce que tu as pu lui dire, là où même toi, dans ta situation douloureuse, tu ne t'en souviens plus) Et à cette question, tu regardes ton téléphone à l'autre bout de la pièce, hurlant à son intention, ou à celle de Monsieur "Mais j'en sais rien. Tu crois vraiment que j'ai la tête à m'occuper de ces conneries ? J'ai maaaal ! Donne-moi un spasfooooon". C'est à ce moment précis que tu pourras te diriger gentiement vers la sortie pour te rendre à la maternité.
La troisième et dernière option, c'est le déclenchement de l'accouchement. Ton marmot n'a pas envie de sortir, il est bien au chaud dans ton bidou et il a encore envie de te torturer la nuit sur la position que tu devras prendre pour dormir. Auquel cas, pas de surprises pour toi. Désolée. -Mais non, tu n'es pas punie, rho-
Bref, te voilà à la maternité. Je te passe les détails des monito', prises de tension, vomissements (eh eh, si, ENCORE) et autres péridurales et perfusions, vidage de vessies au moyen d'un petit tuyau qu'on te rentre d... Ok, j'me tais. Tu découvriras ça plus tard.
Mais, pour ne rien te cacher, la péridurale, c'est ta meilleure amie d'une journée. Je n'avouerais pas qu'une fois qu'elle était installée, je me suis retrouvée assise en tailleurs sur la table d'accouchement, en train de chanter à tue-tête "Je te survivrais" de Jean-Pierre François. Non, non, je ne le dirais pas. -D'ailleurs, je dois remercier Pocket Daddy pour cette chanson que je ne connaissais pas avant son arrivée dans ma vie et je crois, sans conteste, qu'elle m'aurait manquée si je ne l'avais pas connue-
En somme, la douleur passe. Et puis elle revient, le temps d'une heure et demie, le temps de sortir la tête de ton bébé de ton vagin dont le diamètre initial n'est de seulement quelques centimètres. Une pastèque qui passe par un citron. Tu as tellement mal que tu en viens à croire que soit tu vas mourir, soit tu veux mourir.
Pendant ce temps, l'homme est debout à côté de toi. Il est aussi livide que tu n'es rouge. Il hésite entre te caresser le front, t'asperger avec la bombonne d'eau minérale, s'asperger lui même avec la bombonne, aller fumer une clope, frapper jusqu'à ce que mort s'en suive la sage-femme qui te répète sans cesse de pousser. Tu as bien compris : il est dans les starting block. Il est prèt à tout, il veut tout faire, mais il est absolument incapable de prendre une décision.
Ce qui se passe, pendant ce temps là dans la tête de l'homme, c'est que son cerveau fait une sorte de reboot. En sortant de cette salle, il aura oublié le calvaire de nos crises alimentaires et vomitives, de nos sautes d'humeur, des demandes étranges comme des élastiques à cheveux pour pantalon... Pendant ce temps là, madame, Monsieur vous aime de toutes ses forces, mieux qu'au premier jour. Et il est scotché de vous voir aussi forte que vous ne l'êtes dans un moment aussi effrayant pour lui, qui se rappellera toujours du sang, des mots, des odeurs et des regards parfois lourd de sens des sages-femmes.
De votre côté, vous ne le voyez pas. Vous ne fixez que les néons blancs de la salle, vous ne relevez aucune odeur, vous n'entendez plus les bruits des instruments métalliques qui vont et qui viennent sur la petite table ambulante, vous ne sentez pas non plus la sage femme vous couper, petite incision qui vous vaudra une démarche de canard pendant une semaine, la seule chose que vous entendez, c'est sa voix à elle qui vous dit de pousser, de faire encore un effort, de pousser encore. Tout cela revient une fois qu'elle vous dit "ça y est, votre bébé est sorti madame !"
C'est à ce moment là, lorsqu'elle vous pose votre bébé sur la poitrine, que tout bascule.
Vous êtes maman.
Et c'est à ce moment là que vous vous rendez compte que, comme le dit l'adage : Mal d'enfant, mal joli. Sitôt fini, on l'oublie."
Pocket Mum